Je suis un aventurier professionnel depuis vingt ans. Au cours de ces dernières années, j’ai roulé ma bosse sur tous les terrains et toutes les saisons. Souvent, on m’a vu dans le Nord : Nunavik, Nunavut, Yukon, Alaska. Je suis aussi allé dans le sud. L’extrême sud en fait, celui que l’on confond avec le nord. Là, il fait vraiment froid. En Antarctique, au pôle sud, à une altitude d’environ 3700 m, il faisait – 50 °C sans le vent.
Et pourtant, je déteste avoir froid ! Pourquoi visiter ces endroits dans ce cas me direz-vous? Parce que j'adore me rendre dans les contrées les plus vierges de notre planète. J'aime explorer un paysage figé dans le temps où la vie et la nature s’épanouissent sans frontière. Ça me connecte avec l’infini, à l’univers, à la vie tout simplement. J’ai vu des paysages beaux à en pleurer. J’ai été envahi par la gratitude. J’ai littéralement parlé avec les animaux, les montagnes et le vent. Ils m’ont exprimé le lien qui nous unit tous et ils m’ont parlé de moi. Je suis d'ailleurs prêt à mettre de côté une bonne partie de mon bien-être pour faire cette activité, malgré ce que ça implique. D'ailleurs, je trouve que certains paysages valent amplement l’inconfort.
Avec les années de pratique, j’ai cumulé plusieurs trucs qui rendent l’expérience plus confortable et qui pourraient vous être vraiment utiles, afin de rendre vos sorties plus agréables. Qui sait, avec ces conseils, vous irez peut-être plus loin dans vos défis.
Fait-il froid ou « fret » ?
Selon vous, quel froid peut-on qualifier de fret ? Parce que le Québécois a tendance à utiliser le terme « fret » pour exprimer un froid vraiment désagréable. Alors, est-ce que c’est le fret sec ou le fret humide ? La plupart des gens que je questionne à ce sujet me répondent le fret humide. Considérant que l’on peut se refroidir jusqu’à 29 fois plus vite immergé dans l’eau (d’après la Société de sauvetage du Canada), l’humidité est le facteur prépondérant dans la physique de l’inconfort.
Vous serez probablement surpris d’apprendre que l’épisode le plus extrême d’hypothermie que j’ai vécu en expédition s’est déroulé en pleine jungle bolivienne, là où il fait 30 degrés durant le jour. En effet, il faisait très chaud cette journée-là, mais en après-midi, un orage est venu bouleverser l’ambiance. Je n’avais pas prévu ce changement de météo. La fatigue, le manque de nourriture, l’altitude et le vent ont fermé le piège. Incapable d’allumer un feu, j’ai dû me résigner à retarder ma progression dans la montagne et à poser ma tente en urgence. Je laissais ainsi mes deux coéquipiers sans nouvelles de moi pour une nuit d’enfer. Ils se sont demandés toute la nuit qu’est-ce qui m’arrivait depuis le moment où je les avais quittés dans le but de trouver un chemin pour sortir d’un canyon trop escarpé. Cette mésaventure était le résultat d’un grand nombre de décisions prises dans l’erreur. Nous avions poussé trop loin un projet de descendre une source du fleuve Amazon, un défi qui s’est avéré être une excellente mauvaise idée comme dirait mon coéquipier Jacob Racine. L’histoire est tellement rocambolesque. J’en ai fait un film. Bref, j’ai eu extrêmement froid dans les montagnes à chercher une sortie vers des lieux moins hostiles. L’hypothermie peut être un danger insidieux pour n’importe qui, à tout moment et n’importe où. Gardez en tête que la pluie peut rapidement compliquer le jeu.
Avez-vous déjà eu froid en situation de survie?
Une situation de survie est presque toujours un événement où nous avons fait une série de choix qui, seuls, semblent insignifiants, mais qui ensemble donnent un scénario potentiellement mortel. L’hypothermie est le plus grand danger en plein air. Les gens qui sont morts perdus en forêt ont presque tous été frappés par ce mal qui les a endormis pour l’éternité. Au début, on a juste froid, puis on grelotte et sournoisement, nos pensées deviennent confuses. Plusieurs récits racontent que des gens ont cédé à la folie et ont fini par se déshabiller, accélérant ainsi ce terrible processus causant l’irréparable.
Sachez reconnaître les indices d'hypothermie et agissez avant qu’il ne soit trop tard.
Il n’y a pas de mauvaise température, il y a seulement des gens mal habillés. Si un jour j’ai la chance de vous enseigner la survie en forêt, vous recevrez une liste de matériel avec cette mention surlignée en rouge: « N’apportez pas de coton ! » C’est une simple note pour signifier que cette matière n’est pas adéquate en plein air pour lutter contre le froid, surtout quand elle est humide. Le coton est terriblement inefficace à cause de sa propension à imbiber l’eau. Dès les premiers efforts, votre sueur sera stockée dans votre t-shirt préféré et viendra vous déranger au mauvais moment. Privilégiez les fibres synthétiques comme le polypropylène ou les fibres animales comme la laine. Celles-ci restent chaudes même lorsque humides. Je vous conseille aussi d’avoir plusieurs couches de vêtements. Ainsi, il sera facile de vous ajuster aux conditions extérieures. Vous éviterez de suer ou de vous refroidir avec un vent imprévu.
Durant mes voyages, par exemple en Bolivie, j’avais dans mes bagages un sac-poubelle qui m’a évité le pire, le temps que je trouve un endroit pour me poser. Le plus souvent, il m'a servi à ramasser les déchets que je trouvais dans le bois. C’est plus fort que moi, je ne peux m’empêcher de nettoyer ces endroits pour que ce soit plus propre pour le prochain visiteur. En cas de besoin, ce sac peut toutefois devenir un imperméable d’urgence si on a pas eu la présence d’esprit d’apporter une veste. Il s’agit de faire deux fentes au niveau des bras et on peut l’enfiler. Pensez-y ! C’est simple, on en trouve partout et c’est efficace. En 2016, j’avais oublié mon anorak de kayak avant de partir pour une expédition de survie. Pendant 12 jours, c’est un sac de poubelle transformé avec du « duck tape » qui m’a servi d’imperméable dans des conditions extrêmes.
Mes aventures m’ont permis d’expérimenter des tonnes de techniques et d’équipements. Je sais allumer un feu par friction. Je l’ai fait des centaines de fois. Mon constat est qu’il n’y a rien de simple dans cette pratique. Si vous voulez être intelligemment paresseux plutôt que « niaiseusement » vaillant, ayez toujours à votre portée un briquet. Avec un seul de ces briquets, vous pouvez allumer 1200 flammes. Hé oui ! Je l’ai testé personnellement. Bref, pour moins de deux dollars, vous pouvez changer une situation dangereuse en simple anecdote. Placez ces petites pièces miraculeuses dans tous vos manteaux, sac à dos, véhicules et trousses de premiers soins. Évidemment, arriver à produire une flamme avec un briquet n’est que la première étape. La suivante consiste à avoir les aptitudes pour la transformer en un beau feu qui vous réchauffera le corps et l’âme. De plus, celui-ci pourrait vous servir à aviser des secours de votre présence dans le cas d’une aventure qui a mal tourné. Le feu et sa fumée peuvent se repérer à des kilomètres.
Avant de me lancer dans une expédition, je suis toujours un plan d’entraînement en fonction du projet à venir. Je crois sincèrement que le meilleur équipement pour une aventure est la condition physique et mentale. L’un s’appuie sur l’autre et vice versa.
La meilleure façon de créer de la chaleur est simplement de bouger. Trente secondes de course sur place peut rapidement vous rendre plus confortable. Le corps humain est comme un poêle à bois plein de braises. S’activer aurait comme effet de souffler sur vos braises et produire de la chaleur. Ajoutez-y un peu de carburant supplémentaire (sous forme de nourriture) pour plus de flammes et vous êtes repartis pour un bon bout, croyez-moi. Cela dit, plus vous serez en forme, plus ce processus sera efficace.
Tous ces détails, comme la condition physique, avoir les bons vêtements et équipements, vous donneront une confiance supplémentaire. Celle-ci vous permettra d’explorer la vie sauvage et ses subtilités plus sereinement. Confortable sans le fret, vos sens se tourneront vers l’extérieur. Vous pourrez enfin vous fondre dans la nature et voir ces animaux qui se cachent partout autour.
Assurez-vous de connaître vos capacités. Gardez-vous une marge de sécurité dans l’exécution de vos aventures et surtout, amusez-vous ! Les plus grands obstacles à nos réalisations de demain sont nos doutes d'aujourd'hui !
Traverser l’Antarctique en ski; atteindre le pôle intérieur de l’Amérique du Sud; effectuer une aventure de survie de 10 jours au Yukon; courir 33 marathons en 7 semaines; survivre 4 jours sans eau, nourriture et équipement l’hiver au lac Mistassini et naviguer des milliers de kilomètres sur l’océan : voilà quelques-uns des défis réalisés par Frédéric Dion. Il a reçu une mention d’honneur du Gouverneur général du Canada pour le sauvetage de 9 skieurs dans les Alpes et est impliqué auprès d’Opération Enfant Soleil depuis plus de 10 ans. À 44 ans, Frédéric a animé plus de 2000 conférences grand public, corporatives et scolaires à travers le monde.
Articles par Frédéric DionInscrivez-vous à l'infolettre Latulippe et demeurez à l'affût de nos nouveautés et nos promotions.
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